Le prospect applicable à une loggia dans le PLU de Paris
Conseil d’État, 12 mai 2022, Société Alexice et autres, n°453787, B :
2. L'article UG 7 du règlement du plan local d'urbanisme de la Ville de Paris définit les prescriptions applicables aux implantations de constructions par rapport aux limites séparatives. Il dispose que : " Lorsque les dispositions inscrites aux documents graphiques du règlement ne sont pas conformes aux dispositions du présent article, elles prévalent sur ces dernières (...) ". Cet article prévoit dans sa partie UG 7.1 que : " (...) Lorsqu'une façade ou une partie de façade à édifier en vis-à-vis d'une limite séparative (...) comporte une ou plusieurs baies constituant l'éclairement premier de pièces principales, elle doit respecter, au droit de cette limite, un prospect minimal de 6 mètres (...). / Lorsqu'une façade ou une partie de façade à édifier en vis-à-vis d'une limite séparative (...) comporte une ou plusieurs baies dont aucune ne constitue l'éclairement premier de pièces principales, elle doit respecter, au droit de cette limite, un prospect minimal de 2 mètres (...). / Lorsqu'une façade ou une partie de façade à édifier ne comporte pas de baie constituant une vue, elle peut être implantée en limite séparative ". Par ailleurs, l'article UG 11 du règlement du plan local d'urbanisme mentionne, parmi les éléments en saillie dont il donne la définition, notamment pour l'application des règles de gabarit-enveloppe, les balcons mais non les loggias, tandis qu'il cite, parmi les reliefs contribuant à la mise en valeur des façades, les loggias et non les balcons.
3. Il résulte de ces dispositions, ainsi que de la figure 4 inscrite au règlement du plan local d'urbanisme que, lorsqu'une façade ou une partie de façade comporte une loggia, celle-ci doit être regardée, au sens et pour l'application du règlement du plan local d'urbanisme de Paris et à la différence d'un ouvrage en saillie par rapport à la façade tel qu'un balcon, comme un élément de la façade elle-même en faisant partie intégrante, et l'ouverture extérieure de la loggia, qu'elle soit ou non dotée de fenêtres, constitue une baie au sens et pour l'application de ces dispositions. Le respect des règles de prospect qu'elles définissent est dès lors apprécié au regard de la distance calculée entre cette baie et le point le plus proche de la façade en vis-à-vis.
4. Il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que le respect des distances prévues par les dispositions citées au point 2 ne se calculait pas à partir du rebord extérieur des loggias ouvertes situées sur la façade sud du bâtiment mais à partir de la baie permettant d'y accéder et que ces loggias n'étaient donc pas soumises à la règle de prospect définies par ces dispositions, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.
Lorsque l’on procède à l’analyse de la régularité d’un permis de construire, la vérification du respect des règles de prospect est souvent source de maux de tête.
À l’origine de ces difficultés, on retrouve bien souvent l’application de ces règles aux balcons, loggias et autres saillies en façade.
L’arrêt rendu par le Conseil d’État est propre aux dispositions du plan local d’urbanisme de Paris mais il pourrait éclairer l’interprétation d’autres PLU et donc il est intéressant à examiner.
Les règles de prospect par rapport aux limites séparatistes (limites avec les autres propriété, par opposition aux limites sur voie) applicables à la zone sont variables en fonction de la présence ou non de baies sur la façade et de la fonction de ces baies comme source principale de lumière ou non.
Une façade comprenant une ou plusieurs baies constituant l’éclairement premier des pièces principales devra respecter une distance minimale de 6 mètres par rapport à la limite séparative considérée,
Une façade comprenant des baies mais qui ne constituent pas l’éclairement premier des pièces principales, doit respecter une règle de prospect de 2 mètres par rapport à la limite séparative,
Si la façade ne comporte pas de baie constituant une vue, alors elle peut être implantée en limite séparative.
L’article UG 11 de ce même règlement mentionne les balcons parmi les éléments en saillie, mais pas les loggias (la différence entre un balcon et une loggia est la saillie, le balcon déborde de la façade tandis que la loggia est intégrée dans la façade principale, comme une pièce supplémentaire mais qui peut être ouverte).
À l’inverse, cette même disposition évoque les loggias comme reliefs contribuant à la mise en valeur des façades, mais pas les balcons.
Enfin, le Conseil d’État a tenu compte de la figure 4, sachant que les éléments graphiques du règlement priment sur les éléments textuels (c’est le PLU qui le dit, ce n’est pas une règle générale).
Cette figure est la suivante :
Sur la base de l’ensemble de ces dispositions et schémas issues du PLU de Paris (je souligne, ce sont des règles particulières), les juges ont décidé qu’il faut considérer une loggia comme faisant partie de la façade elle-même.
L’ouverture de la loggia, munie d’une fenêtre ou non, est une baie au sens des dispositions relatives aux prospects.
Ainsi, par exemple, pour l’application de l’article 7, si l’ouverture de la loggia, même non munie de fenêtre, est la source principale de lumière dans les pièces principales, alors la distance minimale par rapport à la limite séparative est de 6 mètres.
Cette distance sera calculée par rapport au bord extérieur de la loggia puisqu’elle est comprise dans la façade :
Crédit illustration de l’article : Bradiporap