On ne considère que l’esthétique du projet dans Engoulevent
Conseil d’État, 12 mai 2022, Société Léane, n°453959, B :
3. Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ou à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé dans le second temps du raisonnement, pour apprécier la légalité du permis de construire délivré, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux visés par les dispositions mentionnées ci-dessus.
4. Il n'en va pas différemment lorsqu'il a été fait usage de l'article L. 451-1 du code de l'urbanisme permettant que la demande de permis de construire porte à la fois sur la construction et sur la démolition d'une construction existante, lorsque cette démolition est nécessaire à cette opération. Dans un tel cas, il appartient à l'administration d'apprécier l'impact, sur le site, non de la seule démolition de la construction existante mais de son remplacement par la construction autorisée.
Le Conseil d’État, dans un arrêt Association Engoulevent et autres (Conseil d’État, 13 juillet 2012, Association Engoulevent et autres, n°345970, B) a mis en place une application de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme (Anciennement R. 111-21) à double détente (résumée ici grossièrement) :
D’abord le maire apprécie la qualité du site,
Ensuite, il vérifie si le projet porte atteinte à cette qualité.
Il y a lieu de préciser que ce mécanisme à double détente s’applique également aux dispositions des règlements des plans locaux d’urbanisme qui en reprennent la substance (Conseil d’État, 28 novembre 2014, Association Lac d’Annecy, n°366103, C).
Ici, il s’agit d’un permis de construire valant démolition.
Le maire avait refusé le permis de construire au motif qu’il méconnaissait les dispositions de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme et l’article 11 du règlement du PLU qui en reprenait les termes.
Le juge des référés de première instance avait noté que le bâtiment qui devait faire l’objet d’une démolition ne faisait certes pas l’objet d’une protection architecturale au titre du plan local d’urbanisme de la commune mais il présentait tout de même une qualité architecturale et avait par conséquent écarté le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions par le maire.
En d’autres termes et de manière plus aisée à lire : c’était dommage de démolir ce bâtiment donc le projet méconnaissait l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme.
Or l’objet de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme est de sanctionner les projets qui porteraient atteinte à leur environnement et non d’opérer une balance des intérêts en tenant compte de l’esthétique du bâtiment qui doit être démoli.
L’autorité administrative doit donc vérifier l’atteinte du projet sur le site.
C’est là ce que nous dit le Conseil d’État : l’autorité administrative doit non pas vérifier les seules conséquences de la seule démolition de la construction existante par le permis de construire mais les conséquences du remplacement de la construction par le projet sur le site.